... avec Caroline Lejeune.
Elle excelle dans la peinture et surtout celle de forêts. Elle se promène, prend des images et les reproduit ensuite à l’huile sur toile avec une virtuosité et un sens « de la branche » sans précédent. Le plus étonnant encore est le caractère abstrait de sa touche rapide qui paradoxalement devient pure matérialité dans la composition finale. De près ce sont des taches vives et expressives en nuances de gris, en somme du gribouillis ; mais lorsqu’on s’éloigne, le sous-bois est bel et bien là, les branches en résille, la lumière filtrée par les feuillages, la terre, les petits cailloux, quelques feuilles au sol, la mousse… bref tout y est.
Malgré les nombreuses peintures qu’elle a produites sur ce thème, on ne se lasse pas pour autant de ces paysages de nature « sauvage », chaque tableau est unique dans son ambiance et son expressivité. C’est parfois la forêt profonde et menaçante de la sorcière de Blanche-neige, ou celle qui murmure de sa faune invisible, ou encore celle de notre enfance où l’on se sent libre et en sécurité à l’abri dans une cabane.
Mais plus que pittoresques, les paysages qu’elle peint sont chargés d’un sens caché. C’est la forêt façonnée par les hommes, une nature couleur béton un peu fausse. Sensation étrange que de ne pas parvenir à se laisser complètement aller à la rêverie d’un paysage hypnotique. C’est comme si on était retenu par notre humanité qui veut toujours fabriquer, construire, améliorer, incapable de laisser les choses en l’état. C’est sur le fil de cette ambiguïté que les images de Caroline Lejeune prennent tout leur sens. Elles touchent une vérité universelle de manière implicite en entrechoquant quelques paramètres simples mais essentiels : la couleur, la forme, le choix du cadrage.
Cette vidéo témoigne largement de la facilité avec laquelle la peintre s’exprime au travers de son travail. Je vous le concède, la voix qui pousse la chansonnette est agaçante mais c’est sa manière d’accoucher sa sensibilité, elle dévoile son processus de création avec sincérité et se montre ainsi à la caméra à fleur de peau. Elle a également produit des images d’humains mais ses arbres me semblent d’une qualité tellement supérieure que je n’en parlerais pas ici de peur d’être trop critique. Elle a trouvé son domaine dans les sous-bois et c’est là où, pour l’instant elle exerce son art au maximum.